Manipulation, mensonges et critères pour dégager les sales cons.

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Depuis le dernier article sur l’homme qui a un podcast sur les masculinités, j’ai appris chaque jour une révélation. On n’était plus à ça près mais l’accumulation de faits, toujours cachés, montre une personnalité qui ne sait pas se tenir avec les femmes. Comme je ne suis pas psy, et parce que les diagnostics peuvent montrer tout et son contraire, je ne vais pas disserter sur la différence entre manipulateur, narcissisme ou sur immense trauma. Cet homme trompe son monde. Il trompe tellement son monde qu’il faudra faire le deuil d’une vérité et surtout de ma propre histoire. Peut-être même si j’osais : de nos histoires.

J’ai toujours dit que je protégerais les femmes qui sont venues me parler en 2021. J’ai rencontré une femme, inquiète pour sa sœur qui sentait la bascule vers le chaud et le froid. J’ai rencontré des femmes qui m’ont décrit le chaud puis le froid, le bon sexe, les compliments, puis le froid. Et puis en 2024, j’ai rencontré celle qui a entremêlée son histoire à la mienne. Pendant dix huit mois. Nous étions cachées l’une à l’autre.

Je n’ai jamais été une jalouse et une possessive. Je vis des relations ouvertes et à égalité entre chacun.e de mes partenaires et je suis une bâtisseuse : mes relations sont longues et profondes. Il était parfaitement intégré à ce schéma. J’aurais accepté cette femme avec plaisir et même avec tendresse.

J’ai eu honte les premiers temps de dire que nous nous étions revus. J’ai eu honte de dire qu’on ne s’était pas que revus, mais qu’on s’était frôlés et bien plus encore. J’ai eu extrêmement honte de le dire, j’ai mis du temps à le dire à ma meuf, j’ai mis du temps à assumer auprès de mes copines féministes. En fait, je n’ai pas dit à mes copines féministes. J’ai donc perdu de nombreux contacts, car cette honte de trahir la cause, de trahir le call-out, de savoir que je sortais avec une personne qui avait été si mauvaise, m’a mangé de l’intérieur. Quelle féministe j’étais si je sortais avec cet homme ? J’étais persuadée que mon amour allait le sauver, qu’il avançait et travaillait bien. Régulièrement, je lui demandais si il avait des rencontres. Il m’a toujours répondu non. C’est terrible de savoir mentir comme ça.

Cette honte, que je ressens différemment aujourd’hui, elle ne vient pas de nulle part. Elle vient de la violence de septembre 2021 avec une exposition maximale de son ex femme et de moi. Récits récupérés par les masculinistes et par les TERF. C’était dur. C’était dur parce que j’aimais encore cet homme et que la trahison était forte et m’était apprise par une autre. Jamais par lui.

Cette honte, elle était aussi entretenue par lui. Alors que cela faisait trois ans que je le côtoyais, il n’a jamais parlé de moi à quiconque, même pas à un ami et encore moins à cette femme qui l’a fréquentée en même temps que moi. Il disait « Je vois Paradoxa de temps en temps. » De mon côté, mes parents, ma sœur, mes amies proches, des inconnues en soirée, mes collègues, mon fils, absolument tout le monde savait que je sortais avec l’homme au podcast. Tout le monde sauf mes copines féministes.

Il a trouvé mille excuses pour expliquer des détails, il écrivait à l’une ou à l’autre quand il était avec l’un ou l’autre. Il s’est amusé parfois à me raconter n’importe quoi et j’y ai cru. Parce que c’est sûr, les hommes peuvent changer.

Et puis il y a eu le coup de grâce : il a couché sans capote avec nous deux pendant dix-huit mois. Sans nous prévenir. Mettant en danger mes autres partenaires. Et surtout nous mettant en danger toutes les deux.

Le seul point positif de cette histoire, c’est que j’ai rencontré aucune femme qui se soient plaint d’agressions et/ou de viol.

Mais on a pourtant affaire à un sale con.

Le dernier article m’a amené à une réflexion plus poussée sur les sales cons. Car je suis gênée par un point qui me parait capital : on peut être tous et toutes les sales cons de quelqu’un.e. On peut se tromper, on peut tromper, on peut ne pas dire la vérité. Et oui quand on découvre, ça fait très mal, on souffre pendant plusieurs semaines. Quand on a fait le sale con, on a honte, pendant des semaines, on apprend de ses erreurs, ou pas, mais on avance dans notre vie. J’ai été moi-même une sale conne avec mon ex-mari.

Quelle différence peut-on faire entre un récit « lambda » de sale con et le sale con qui nous intéresse ?

1 – Il y a tout d’abord la répétition. Et ça, je peux vous le dire, la répétition, il connaît. Méthode (chaud et froid), déformation de la vérité à son avantage, et donc mensonges, rituels souvent similaires, mais si il s’adapte à la personne. Bel effort. J’ai repris mes calculs depuis 2021, j’ai six témoignages. Sans le mien qui compte double non ?

2 – L’accessibilité de la personne à d’autres femmes Un agent immobilier de Montélimar qui tente d’avoir une double vie est un vrai sale con, mais il n’a pas accès à des milliers de femmes qui suivent son compte instagram et qui viennent se confier en pensant que ce mec est le meilleur. Avec l’homme au podcast, on s’est rencontrés dans ce cadre-là. Il a eu envie de faire une interview seulement après. La plupart des femmes rencontrées l’ont été dans le cadre du podcast, qui était un argument pour les rencontres sur applis et dans la réalité.

3 – La protection du milieu et les relais médiatiques. Je suis désolée de remettre les pieds dans le plat, mais beaucoup de féministes, de comptes instagram féministes, de festivals féministes, d’éditrices féministes, le soutiennent en partant du principe qu’il a changé. (Mention spéciale à ce festival qui a invité l’homme au podcast et le collectif qui a repris mon propre compte Instagram sur la charge mentale. Je n’ai jamais autant halluciné, et lui il a adoré… Petite médaille à l’ambassade de Grèce qui l’a invité et qui lui a permis de faire de belles rencontres.) C’est une grave grave erreur. Parce qu’il n’a jamais démontré qu’il avait changé. Le temps ne fait pas le changement. La méfiance est obligatoire quand il y a des rumeurs et de nombreux témoignages. On peut ignorer, se désabonner, ne plus inviter, ne plus partager, et se dire que la personne fait sa vie. Pour moi, c’est le premier stade. Le second stade, c’est être proactive et le dire souvent. Je n’ai vu aucun des deux chez la plupart des féministes et des comptes sexos. Il est aussi protégé par son média en ligne qui publie son podcast, très fort, et par d’autres médias, même si sa tribune ridicule en 2020 chez Causette pour s’excuser de sa misogynie de 2013 sur Twitter a un peu calmé le jeu. (Non je ne parlerai pas d’autres revues, qui ont dit oui en pleine tempête 2021 et qui ont finalement reculé… Encore heureux.) Quoiqu’il se passe dans la vie privée d’un homme féministe, si il y a plusieurs témoignages, il faut le dégager. Même en sortant avec lui, j’aurais compris pourquoi il était dégagé et j’aurais trouvé ça normal qu’il y ait une sanction collective, qui n’avait absolument aucun lien avec mon histoire et mes erreurs.

Pour moi, avec ces trois critères, on n’évite de se retrouver dans des positions politiques compliquées et de faire un bureau des mœurs. C’est par la détention du pouvoir avec capital culturel et symbolique, dans ce cas-là, mais on peut aller jusque économique pour d’autres, qu’on peut tirer la sonnette d’alarme. Les violences psychologiques sont encore trop vues comme des violences normales dans les couples dysfonctionnel, avec un besoin de donner tort et raison aux deux : « elle s’est laissé faire, elle aussi, elle l’a insulté« . Mais la violence psychologique, avec des schémas, des contournements de la vérité et le chaud/froid, ne peuvent qu’amener la personne vers une emprise. Celle-ci est reconnue par les insultes et le dénigrement, mais elle est peu reconnue quand elle est plus sourde, avec une  domination par la technique du chaud/froid, quand on met en danger plusieurs femmes par des comportements à risque (alors qu’on dit dans son podcast que ce n’est pas bien !), qu’on conduit vers des hôpitaux psys une partie des femmes qu’on a fréquentées. Il est plus facile de garder son réflexe misogyne et de penser qu’elles sont toutes hystériques, ou faibles (son argument préféré me concernant : je suis faible pour encaisser…), que de reconnaître que son pote est un sale con.

L’homme au podcast dépasse largement les trois critères. C’est pourquoi il est dangereux de continuer à le soutenir et surtout qu’il ait accès encore à une audience. J’ai envie de dire qu’il est temps de faire le ménage et de bien comprendre les enjeux : vous ne pouvez pas ignorer les violences psychologiques en vous disant que les deux ont un peu tort. Nous sommes nombreuses. Je ne suis pas une exception. Juste je fais plus de bruit que les autres car je peux me le permettre.

J’ai encore quelques privilèges qu’il ne m’a jamais enlevés.

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